Près de 70 % des pères assistent à la naissance de leur enfant. Mais seulement 20 % d’entre eux disent avoir réellement souhaité y assister. Pour eux, elle est le prolongement de l’acte de procréation ou l’aboutissement de la préparation à la naissance, surtout si celle-ci doit se faire « sans violence » ou avec l’aide de l’haptonomie. Il semble donc que, dans la majorité des cas, les pères acceptent d’être présents à l’accouchement pour faire plaisir à leur compagne.
Certains restent du début à la fin, d’autres ne supportent pas le moment même de la naissance et suivent uniquement le temps du travail, d’autres au contraire n’arrivent qu’au moment de la naissance.
Une expérience différemment vécue
Malgré tout, lorsqu’on les écoute, on s’aperçoit qu’ils ne le regrettent pas : ils gardent de l’événement un souvenir impérissable, ils sont généralement étonnés de la puissance et de la douleur de l’enfantement, ils n’avaient jamais imaginé que l’effort physique que doit fournir la femme était aussi intense ; bref, ils sont réellement admiratifs. Par ailleurs, le bébé les surprend beaucoup : son visage bleu déformé par la poussée, la taille de sa tête et de ses épaules, la matière blanchâtre qui le recouvre, l’aspect torsadé du cordon ou encore la rapidité avec laquelle, une fois la tête passée, il se jette dehors. Des images qui ne leur étaient pas complètement étrangères, mais qu’ils cachaient soigneusement dans leur inconscient. Et puis, voir « sa femme » accoucher, voir « son bébé » naître est totalement différent du fait de regarder un reportage, même très réaliste sur la naissance.
Plus ou moins actifs
Pratiquement plus aucune maternité ne refuse la présence du père à l’accouchement. Il est plus ou moins le bienvenu, plus ou moins bien accueilli en salle de travail, mais accepté. Bien sûr, en cas de complication, on demande au père de sortir le temps de l’intervention. Quelques pères font le choix d’avoir un rôle actif. Ils aident alors la mère à contrôler sa respiration, surtout au moment de la poussée ; mais ils peuvent aussi être tout simplement rassurants par leur présence.
Chez les couples ayant fait le choix de l’accouchement sans violence, le rôle du père consiste à accueillir l’enfant : il le pose sur le ventre de sa femme, coupe le cordon ombilical, le berce dans l’eau tiède du bain.
Ce n’est généralement pas par indifférence qu’un père refuse d’assister à l’accouchement de sa femme. La maternité est souvent pour les hommes une affaire de femmes, de douleur et de sang. Ils ne se sentent pas alors capables de supporter tout ça, dans ce cas mieux vaut qu’ils s’abstiennent, rien n’est plus contagieux que l’angoisse.
Parfois exclu
Pour certaines futures mamans, il est exclu que le père soit présent à l’accouchement. Leurs motivations ? Elles désirent profondément, et souvent sans le dire ouvertement, vivre cet instant égoïstement.
D’autres ne peuvent imaginer de donner à leur conjoint le spectacle de leur corps dans l’effort de l’enfantement. Souvent, l’homme vit cette naissance comme une « mise à bas » et ce rapport au monde animal gêne beaucoup de femmes.
Naissance en vidéo
On rencontre de plus en plus de pères cameramen lors de l’accouchement en salle de travail. Tous les accoucheurs ne supportent pas ces chasseurs d’images.
Quant aux psychologues, ils pensent que c’est un moyen de se cacher : derrière le viseur, le père ne participe plus, il est uniquement spectateur. Enfin, une fois le « reportage » réalisé, encore faut-il travailler habilement le montage, car les images ne sont pas toujours poétiques.
D’ailleurs certains pères en ont conscience : ils commencent à filmer puis, pris par l’émotion, interrompent le reportage.
La projection se fera avec certaines précautions, notamment auprès des enfants de la famille. De plus, certaines mères ne supportent pas vraiment d’être ainsi données en spectacle. La naissance d’un enfant est sans doute un des moments les plus intimes de la vie d’une femme.
Les pères : acteurs ou figurants
Dans certaines maternités, on apprend aux pères à accoucher leur femme. Films vidéo et informations des praticiens leur permettent d’effectuer, sous le contrôle de l’équipe médicale, les gestes de la mise au monde. Bien sûr, ces pères et ces mères sont volontaires pour cette expérience. Dans d’autres maternités, le père est toléré plus qu’invité. Placé à la tête de la table d’accouchement, il est autorisé à soutenir le moral de sa femme ; mais à la moindre complication, on lui demandera de sortir.
La couvade
Dans de nombreuses peuplades, il ne saurait être question que le père assiste à l’accouchement, mais il joue un rôle important. C’est notamment ce que manifeste la couvade. L’homme est alors censé participer à la douleur : il crie, il hurle. Plusieurs explications sociologiques peuvent être données. L’homme crie pour attirer sur lui les mauvais esprits, il les trompe et, pendant ce temps-là, sa femme peut accoucher sans être tourmentée. On dit aussi qu’il prend sur lui une part de souffrance et qu’il soulage ainsi sa compagne.
Psychiquement, ces manifestations n’ont rien d’étonnant, parce que la mise au monde réveille chez lui, comme chez la femme, l’angoisse de sa propre naissance. Aujourd’hui, l’homme ne se couche plus, ne crie plus, mais on observe curieusement des douleurs d’estomac, des maux de dents, des orgelets, des cauchemars, des angoisses, une prise de poids… bref toute une série de troubles psychosomatiques.
Père et mère : chacun son rôle
Que les pères maternants ne craignent pas d’être perturbants pour leur enfant. Tous les spécialistes l’affirment, l’enfant, dès ses premières semaines, fait la différence entre son père et sa mère; même si c’est lui qui assume toutes les tâches de maternage. Il est capable de reconnaître les voix, l’odeur et surtout les gestes.
Hommes et femmes ne tiennent pas, ne manipulent pas un bébé de la même façon. Cependant, quoi qu’il fasse, le père ne pourra pas empêcher que le premier rôle, tout au moins dans les premières années, revient avant tout à la mère.
Par contre, il aura toute son importance dans la recherche de l’autonomie du bébé. Le père est alors l’agent séparateur indispensable dans le couple mère-enfant.